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18/11/2021
Gardens from graves
SOMNENT
 
J’aime quand un album résiste à toute analyse rapide, facile et nettement définie, étiquetée et cernée. Après une phrase introductive de cet acabit, n’allez pas imaginer que Gardens From Graves constitue je ne sais quelle révolution artistique, foncièrement inédite et novatrice. Afin de vous situer les débats, SOMNENT est le projet d’une seule et même personne, en l’occurrence Giovanni Antonio VIGLIOTTI qui, contrairement à ce que pourrait légitimement penser son patronyme italianissimo, se trouve localiser en Floride. Le projet a auparavant produit un EP cinq titres en 2015, Eventide, et un album en 2017, Sojourn. Par le passé, cet état américain, réputé pour être un paradis ensoleillé pour retraités (plus ou moins) fortunés, a d’ores et déjà livré une de ses facettes cauchemardesques en favorisant l’éclosion d’une foultitude de formations de Death Metal (DEATH, OBITUARY, MORBID ANGEL, MASSACRE, MORBID ANGEL, ATHEIST, DEICIDE, MONSTROSITY, CYNIC, NOCTURNUS…).
A l’opposé du pseudo paradis ensoleillé gériato-consumériste, tout autant que des brutalités écrasantes, notre homme solitaire ne songe qu’à mettre en musique son spleen, sa mélancolie. Pour y parvenir, il a recours à une arme fatale, trop souvent mésestimée, voire méprisée : la simplicité.

Simplicité dans l’écriture, dans la composition, dans les arrangements. Quand bien même le schéma introduction-couplet-refrain n’est pas forcément prééminent, l’auditeur se trouve confronté à des séquences mélodiques majoritaires, basées sur des arpèges dépouillés, très classiques, sous-tendu par une section rythmique laconique sans être monolithique. Dans ces moments, le chant consiste en une voix claire, posée et délicate, parfois chuchotante, livrant sans pathos excessif son mal-être. Ponctuellement, la guitare s’électrifie, se fait grondante, la pression rythmique augmente et le chant verse dans un registre caverneux, le tout dénotant une influence Death Doom britannique des années 80, les amateurs de KATATONIA pouvant largement adhérer au dispositif. Il faut de surcroît relever la pertinence d’arrangements multiples (claviers vintage, piano, guitare acoustique, harmonies vocales) qui ont pour vocation essentielle de rehausser les mélodies principales, plutôt que d’en mettre plein les oreilles ou de pallier un dépouillement assumé.

Simplicité à nouveau dans l’interprétation, qui fait également montre d’un sens réel de la mesure et évite que la subtilité des sentiments exprimés et des émotions exsudées se trouve ensevelie sous des excès caractéristiques du Metal, notamment dans ses variantes extrêmes. Dans son versant majoritaire calme, le chant ne cherche pas à travestir ses limites (registre grave-médium, peu de puissance) et mise sur des variations limitées mais porteuses d’émotions authentiques, fragilité incluse. Même dans ses exceptions gutturales, la dimension vocale demeure articulée et expressive.

Au total, cet album ne révolutionne pas grand-chose mais, de par sa limpidité structurelle et son authenticité dans l’interprétation, il s’impose comme une belle réussite de Doom mélodique, taquiné par une tendance Death Doom. Coup de cœur (brisé, bien entendu).

Vidéo de Acquiescence : cliquez ici
Alain
Date de publication : jeudi 18 novembre 2021