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25/01/2022
Synchro anarchy
VOÏVOD
 
Fasciné et horrifié, telles furent mes impressions lorsqu’en ’84 j’ai écouté To The Death, la première démo de VOÏVOD que m’avait envoyée l’ami Johnny HART de Metal K.O. Magazine. Et 38 ans plus tard, je ne puis que m’exclamer : quel parcours !

En effet, sidérante évolution que celle de cette gang de gamins dont j’ai l’impression qu’ils ont appris en marchant, en se donnant les moyens d’exprimer ce qu’ils ressentaient, en s’interrogeant et en créant sans relâche, fusionnant au passage les frontières du punk, du metal, du thrash, du prog et du rock psychédélique comme si de rien n’était. Et parallèlement à ce mûrissement musical hors norme qui avait assez vite débouché sur un son reconnaissable entre mille, j’ai assisté à l’épanouissement de leur univers que rendent si singulier les histoires que nous raconte Snake et le graphisme d’Away.

En 2018, j’avais cru que The Wake était le point d’orgue de leur discographie, mais en fait Synchro Anarchy va plus en profondeur, devient plus sombre (sans être désespéré) et se pare d’une production fantastique, à nouveau signée Francis PERRON du RadicArt Studio.

Et pourtant, les conditions d’élaboration de ce nouvel opus des guerriers de glace sont bien différentes de celles du précédent. Alors que The Wake résulte d’un projet serein, organisé et planifié sur deux ans, Synchro Anarchy est le fruit d’une mise sous tension bouillonnante qui ne dura que quatre mois, d’où le titre de l’album que l’on pourrait presque traduire par : « C’était un peu la pagaille mais on a respecté les délais. »

Une chose est sûre, ce nouvel album n’est pas une rupture. Pour preuve, l’enchaînement des premiers accords de Paranormalium, le titre d’ouverture, correspond à la séquence que l’on entend à la toute fin de Sonic Mycelium, le morceau final de The Wake. Au cœur de cet enchaînement majestueux et solennel, s’immisce une guitare ricanante (sombre mais pas désespéré, vous dis-je). Puis intervient un riff nerveux sur lequel Snake est simultanément figé par l’angoisse du créateur et mobilisé par un désir d’expression. Ses mots sont désynchronisés et ce déphasage leur permet de s’insinuer, en d’improbables mélodies, parmi les accords de guitare et les pulsations de la batterie, malgré de multiples pièges rythmiques. Tout au long de l’album, je mesure le talent de ce chanteur en osmose totale avec la musique du VOÏVOD.

Durant Synchro Anarchy, je sens physiquement le temps s’étirer en longues lamentations, puis soudain se compresser dans un dialogue entre guitare, basse et batterie qui se renvoient la balle avec une effroyable précision sur la rythmique syncopée.

Je retrouve ce même travail sur les temps et contre-temps dans Planet Eaters, savourant aussi les accélérations angoissantes qui débouchent sur des phases d’expansion où le son envahit tout l’espace. C’est purement jouissif. Et que dire de ce solo sur lequel Chewy se hisse au niveau d’un Franck ZAPPA ou d’un Steve VAI ?

Mind Clock à l’intro méditative offre également son lot de cavalcades sous haute tension opposées à des passages amples et cosmiques. Je ne peux m’empêcher de faire le parallèle avec Holographic Thinking dont le métal déstructuré, agrémenté de psychédélisme propose une réflexion dans laquelle les lois physiques de l’univers extérieur interagissent avec celles de l’univers intérieur mental.

Anticonformisme, liberté, débrouillardise, créativité, simplicité… est-ce que je fais fausse route ou bien le texte de Sleeves Off est-il bel et bien un autoportrait de Denis BÉLANGER ?

Sombre mais pas désespéré, nous y voilà ! The World Today, un message plein de sagesse et d’espoir pour changer l’avenir. Entre nous, vous ne leur répéterez pas, mais je trouve ces paroles un poil trop bisounours, allant jusqu’à affecter l’intensité dramatique du morceau.

Heureusement, les deux plages suivantes rattrapent le coup. Le haletant Quest For Nothing prend sur la fin une dimension inattendue et s’achève de manière encore plus inattendue à la mandoline. Quant à Memory Failure qui clôture l’album, c’est à lui seul un condensé de tout ce que j’aime dans VOÏVOD : sa folie rythmique, ses agréables dissonances, ses accords déglingués et ses mélodies entre deux eaux. Pour tout cela et pour le reste, Synchro Anarchy est déjà à classer, pour moi, parmi les incontournables de l’année.

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VOÏVOD est composé de :
- Denis ‘Snake’ BÉLANGER : chant ;
- Daniel ‘Chewy’ MONGRAIN : guitare ;
- Dominic ‘Rocky’ LAROCHE : basse ;
- Michel ‘Away’ LANGEVIN : batterie.

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Premiers singles extraits de Synchro Anarchy :
- Paranormalium : Clique ici !
- Planet Eaters : Clique ici !

(Edit. 26/01/2022 - nouveau single)
- Synchro Anarchy : Clique ici !

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Mention spéciale à la fan page la plus vivace et sympa que je connaisse :
- Les Voivodians de Facebook : Clique ici pour rejoindre la famille !
Pumpkin-T
Date de publication : mardi 25 janvier 2022