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28/11/2022
Never surrender
TITANS RAGE
 
C’est dans les vieux pots que l’on fait les meilleures soupes. Que les cinq membres de ce groupe, originaire du nord de la France, ne prennent pas mal cet adage, mis en exergue de cette chronique, car, même si la formation de TITANS RAGE est relativement récente, j’ai noté quelques visages burinés qui dénotent des types ayant pas mal bourlingué. Est-ce l’action combinée de vétérans et de forces plus jeunes qui permet à ce premier album de réaliser l’exploit de ressusciter de manière incroyablement vivace un certain Heavy Metal des années 80 et de ne jamais sonner de manière rétrograde ? Peut-être (ou pas), mais le fait est qu’avec Never Surrender, TITANS RAGE balance dix mandales franchement impressionnantes.

De quel Metal des années 80 témoigne donc le répertoire de TITANS RAGE ? Du Heavy Metal le plus fougueux qui soit. Celui qui fut initié par les incontournables JUDAS PRIEST dès la fin des années 70, dans son versant rapide, violent et tranchant : songez aux titres Exciter (1978), Hell Bent For Leather (1978), Steeler (1980), Screaming For Vengeance (1982), Freewheel Burning et The Sentinel (1984). C’est bon, vous situez l’affaire ? Rien n’empêche de songer au meilleur de SAXON.

Bien, mais TITANS RAGE double la mise en adoptant l’optique visant à radicaliser cette doctrine de base du mythique groupe britannique. Des riffs plus âpres, des tempos plus rapides, des rythmiques plus ravageuses : innombrables furent les groupes qui, tant aux Etats-Unis qu’en Europe, musclèrent leur version du Heavy Metal, avant d’être rapidement dépassés par le Speed Metal et le Thrash Metal. Des noms, venus des deux côtés de l’Océan atlantique ? SAVAGE GRACE, SHOK PARIS, BATTLEAXE, EXCITER, TYRANT (US), RUNNING WILD (au tout début), RAGE (première époque), OMEN, HELLOWEEN (pas plus loin que Keeper Of The Seven Keys Part 1, et encore partiellement). Constatez le niveau qualitatif que le groupe égale, voire surpasse.

Qui plus est, une dimension épique et dramatique se trouve injectée avec goût et pondération, héritée de formations des années 80 comme HELL, GRIFFIN, CIRITH UNGOL, voire MANOWAR (première partie de carrière). Par conséquent, même certaines séquences objectivement basiques (mid-tempo avec riffs tranchants et section rythmique au carré) se trouvent rehaussées, voire sublimées par des arrangements qui font la différence. Ainsi, l’introduction altière de Amon Is Alive précède une gestion millimétrée d’accélérations et de débrayages virilement étayés par des chœurs masculins. Avec ses variations brusques et son final apaisé et brumeux, Kraken constitue également un morceau de bravoure.

Elément central du dispositif mis en place par TITANS RAGE, le chant d’Olivier BOURGOIS régale par son registre globalement clair, variant avec aisance et puissance du médium aux aigus. Particulièrement expressif, il anime parfaitement le dispositif dramatique, passant d’intonations médium un peu rauques et agressives (un peu à la Paul DI’ANNO) à des phrasés plus aigus, souvent percés par de brusques montées perçantes, parfaitement dosées. Œuvrant actuellement chez les vétérans de ROZZ après être passé chez BLACKWHITE), le bonhomme réalise ici une performance bluffante, combinant maîtrise et vivacité expressive. Sa versatilité sur Kraken, le titre de clôture, impressionne : notre homme sonne tour à tour comme Bruce DICKINSON et Paul DI’ANNO, soit le rêve des fans de la première heure d’IRON MAIDEN. Ajoutons que le chant se voit régulièrement rehaussé par des chœurs virils et par des harmonies splendides.

Quant à ses complices musiciens, ils forment un attelage compact et efficace, voire brillant. Le batteur Jeremy JACQUART peut sans problème donner dans le carré et sévère, avec adjonction de grosse caisse en mode démolition sur les tempos les plus enlevés ; par ailleurs, il sait développer un volume plus ample, à base de toms et de cymbales. A la basse, son collègue Guy DUVY anime sévèrement les débats avec un son claquant et des lignes agiles : saint Steve HARRIS donnerait sa bénédiction sans souci ! Enfin, le guitariste Thomas DECRUCQ (également actif chez INNERFIRE) se démultiplie, balançant des riffs trapus ou effilés, multipliant d’excellents solos, vibrants, techniquement tenus et mélodiquement construits.

Vous l’aurez compris, TITANS RAGE bouscule la hiérarchie sur la scène Heavy Metal hexagonale et possède surtout une carrure internationale incontestable. A mon sens, l’acquisition de cet album relève à la fois de l’acte de foi et de l’auto-thérapie, tant son écoute galvanise l’auditeur ! Concluons en mentionnant le titre Lemmy, bref et intense hommage au légendaire bassiste-grogneur de MOTÖRHEAD. Le temps d’un hommage, le groupe change quelque peu de registre : chant rauque et vorace, section rythmique en ébullition et guitare solo attaquant en piqué ; c’est concis, rapide, brûlant, intense… un bel adieu en somme.
C’est sans aucune motivation chauvine, mais cependant sans aucune hésitation, que j’affirme avec force et enthousiasme que Never Surrender constitue une entrée en matière magistrale, un bien beau mélange de rage et de classe, qui fait partie des réussites de l’année : à acquérir impérativement, donc !

Vidéos de Welcome To My Hell cliquez ici et de Never Surrender cliquez ici
Alain
Date de publication : lundi 28 novembre 2022