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Doom teinté de death, mélancolique et complexe
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Pour vous (re)mettre en tête le parcours de ce quartette finlandais, merci de vous rapporter à la chronique d’Astral Doom Musick, troisième album, paru en 2020 (cliquez ici). We Are Already Living In The End Of Times s’inscrit pleinement dans la veine évolutive de son prédécesseur, le groupe ayant glissé d’une base Doom Death Metal à un Doom plus torturé et tortueux, plus aventureux et personnel. Une nouvelle fois, ASTRAL SLEEP affiche une préférence systématique pour des titres aux durées au minimum confortables, voire nettement plus conséquentes ; sans pour autant proposer des pièces aussi monumentales que sur son précédent opus (qui ne contenait que quatre compositions, entre neuf et onze minutes !), ce quatrième disque aligne quatre titres tournant autour de six-sept minutes, et deux morceaux franchissant le cap des neuf minutes. Il est évident que ce cadre généreux permet aux musiciens de développer lentement, inexorablement, leurs rythmiques de plomb, au fil de tempos lents, mais également de les faire évoluer, de créer des ruptures multiples dans les ambiances et dans les rythmes.
Principal vecteur d’émancipation par rapport au Doom Death, l’essentiel du chant du guitariste Markus HEINONEN s’effectue désormais en registre clair, Pour autant, ASTRAL SLEEP n’a pas complètement renoncé à manifester son attachement initial au Doom Death, principalement en usant ponctuellement de vocaux rauques. Toujours dans le spectre le plus extrême du répertoire d’ASTRAL SLEEP, on relève que les vocaux caverneux évoqués ci-avant se teintent parfois d’intonations plus aigres et fielleuses, plutôt typiques du Black Metal. Ces deux marqueurs ne s’avèrent certes pas dominateurs, mais ils contribuent toutefois de facto à la variété du propos du groupe.
Cela dit, cette variété que nous venons d’évoquer, elle s’incarne majoritairement dans les nombreux arrangements plus mélodiques ou orchestraux, à base de guitares en son clair ou acoustique, de synthés, de chœurs et d’harmonies vocales. Rien de compliqué techniquement parlant, mais l’essentiel réside dans l’impact émotionnel, dans la création, parfois subite et splendide, d’ambiances intimistes ou, au contraire, emphatiques. Soulignons en l’occurrence la pertinence et le feeling des interventions du guitariste soliste Santeri KANGASLETSÄ. En dépit de la lenteur générale de l’ensemble (avec tout de même quelques variations entre le très lent et le moyennement lent !), on ne s’ennuie jamais, tant on a l’impression de participer à un voyage initiatique. Pour autant, la dimension presque psychédélique qui caractérisait Astral Doom Musick se voit ici damer le pion par une approche plus ostensiblement Doom, toute en lenteur, en lourdeur et en contrastes puissants, qui m’évoquent pour partie TIAMAT, de l’album The Astral Sleep (vous n’aviez pas fait le rapprochement ?!) à A Deeper Kind Of Slumber. Seulement, là où le modèle TIAMAT avait à cœur d’abandonner à marche forcée toute référence au Doom Death, ASTRAL SLEEP parvient à sublimer ses racines, en les intégrant judicieusement dans un propos plus complexe, pour partie plus progressif, forcément lent et lourd. Concernant ces deux critères, il faut saluer la performance solide et souple à la fois du tandem rythmique – Jaako OKSANEN à la basse et Jiri PYÖRÄLÄ – qui délivre une tonne de fonte à la minute, mais qui parvient à animer subtilement cette pesanteur et cette lenteur : du grand art !
Au cas où vous ne l’auriez pas encore compris, nous recommandons sans réserve l’acquisition de cet album profond, porteur d’une vision évolutive du Doom Metal. Et, que le groupe m’excuse, mais, en écoutant des albums de cette qualité, je ne crois pas qu’on puisse affirmer que la fin des temps est d’ores et déjà présente !
Vidéo (non officielle) de l’album : cliquez ici
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