Métal Intégral - Chronique / BIRDS OF NAZCA

Quand la créativité mue les barrières en fenêtres

Allez, je mets les pieds dans le plat. Le duo nantais BIRDS OF NAZCA doit faire face à deux préjugés un peu pénibles : « un duo ce n’est pas un vrai groupe » et « un album instrumental, c’est ennuyeux ». Effectivement, jouer à deux et sans chanteur revient à se poser des limites. Toutefois, les artistes vous le diront : les contraintes poussent à plus de créativité. Pas de guitare basse ? En plus de ses amplis guitare, Guillaume dérive le signal de sa gratte vers un ampli basse et le spectre sonore d'un power trio est restauré. Pas de chant ? l’esthétique moins figurative reposera sur des variations d’ambiances évocatrices, alternant une multitude d’émotions. Ainsi, à force de se confronter à des limites, le duo recherche, bidouille, s’adapte et finit par se bâtir un son et un univers artistique à l’identité forte. Ils transforment ainsi les inconvénients en avantages, muent les barrières en fenêtres.

Musicalement, BIRDS OF NAZCA fait converger les traits de caractère de plusieurs sous-genres du heavy rock : la richesse des jams instrumentales associées à un son très gras et chargé en fuzz qui définissent le desert ou stoner rock, l’alternance de plages aux rythmiques mid-tempos très lourdes comparables à du doom metal, et des riffs hypnotiques et passages éthérés propres au heavy psych. Je salue le sens de l’équilibre des compositions entre le répétitif, les variations et les ruptures sonores ou rythmiques qui renouvellent sans cesse l’attention de l’auditeur.

Il est possible de raconter une histoire juste avec des titres et des ambiances. Par exemple, du début du Carbonifère jusqu’à la fin du Trias, il n’y avait sur Terre qu’un seul océan et un seul continent, la Pangée (lat. Pangaea). Les premiers dinosaures pouvaient donc aller de Nantes à Sidney en vélo sans prendre le bac. C’est à un tel voyage que nous convie l’album, passant par sept lieux (et morceaux) incroyables : Batagaïka au Sud-Est de la Sibérie abrite un inquiétant cratère, bouche infernale qui grandit d’année en année au fil de la fonte du pergélisol ; Gang Rinpoché est une montagne sacrée à l’Ouest du Tibet où le vent murmure d’immémoriales vérités ; Racetrack Playa, lac californien asséché par intermittence, est connu pour le mystère (résolu) des rochers mobiles ; Man Pupu Nyor, saisissante formation rocheuse de l’Oural, héberge sept géants tels des Anciens lovecraftiens ; sur un lac salé de Bolivie, Incahuasi, île de corail couverte de cactus, incarne une oasis de vie dans un environnement hostile ; et pour finir, le Riftus… Pangaea, c’est-à-dire la dislocation de la Pangée avec l’ouverture de l’Atlantique qui nous laisse sur une fin pleine d’espoir grâce au chant des oiseaux qui évoque le renouveau. Mêlez les décors aux atmosphères et imaginez votre propre road movie à échelle planétaire ! Alors ? Ce n’est pas magique un album instrumental ?

Quelle agréable expérience ! Je me suis laissé embarquer par les modulations de leur flot musical sans voir le temps passer car (nonobstant les soi-disant contraintes du groupe) Pangaea est un album à l’espace sonore large, à la production puissance mais subtile, et au spectre émotionnel riche.

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BIRDS OF NAZCA est composé de :
- Guillaume KERDRANVAT, guitare ;
- Romuald CHALUMEAU, batterie.

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Discographie principale :
- 2020 : Birds Of Nazca - (LP) ;
- 2023 : Héliolite - (EP) ;
- 2025 : Pangaea - (LP).

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Les 2 premiers singles extraits de Pangaea :
- Gang Rinpoché : Cliquez ici !
- Racetrack Playa : Cliquez ici !

Je vous mets en bonus une petite session live, déconnectée de l’album actuel mais qui offre une superbe image de BIRDS OF NAZCA et à laquelle je suis totalement accroc :
- Smoky Van Session #04 : Cliquez ici !

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